C’est bizarre.

Une année passée sur les routes du monde et quand tu reviens c’est presque comme si tu n’étais jamais parti. Les gens s’intéressent à ton aventure l’espace d’un instant et ensuite, les discussions sur le train train quotidien reprennent. Les choses ont changé, mais pas tant que ça!

C’est vraiment irréel.

En arrivant à l’aéroport, c’était l’euphorie. En blaguant, j’avais convaincu les enfants qu’à notre arrivée, il y aurait des gens qui crieraient nos noms. Il y aurait des équipes et on entendrait: « David, David …. Benjamin, Benjamin …. Jacob, Jacob …. Geneviève, Geneviève …. ». Tellement, ils seraient content de nous voir.

Eh bien, je me suis fait prendre à mon petit jeu. Notre folle amie (dans le bon sens du terme) Véro avait organisé exactement cet accueil avec des banderoles en plus. Nous étions sur un nuage. En plus de la joie de revenir, nous avions une vague d’amour des gens qui nous avaient le plus manqués: nos familles et nos amis.

La preuve ⬇️

J’avoue que j’étais un peu surpris et gêné aussi ⬇️

Encore sous l’effet du décalage horaire ou peut-être du décalage d’une année loin des nôtres (voir nos faces sur la photo de couverture de l’article), nous nous sentions comme dans un rêve. Les gens nous parlaient et même si nous étions conscients, nous avions un trop-plein positif d’informations et d’émotions. Tellement, que les jours suivants nous avions de la difficulté à nous rappeler avec qui ou de quoi nous avions parlé. Ce fût comme ça pour les jours qui suivirent.

Même chose quand deux jours plus tard, toute cette petite gang-là et d’autres qui n’avaient pas été en mesure de venir à l’aéroport nous firent un party de retour à notre insu chez nous. Les boîtes trainaient partout, j’avais même pas eu la chance de prendre ma douche depuis Londres et tout d’un coup tout le monde est arrivé pour récupérer encore un peu de temps avec nous. Au début, nous étions un peu sous le choc de devoir « entertainer » tout notre petit monde. Mais en rétrospective, ce fût une bonne chose puisque le gros coup était donné et nous pouvions prendre les prochains jours et même les prochaines semaines pour se réapproprier notre vie.

Du moins c’est ce que nous pensions …

J’avais même espoir de pouvoir prendre quelques jours sur le bord de la piscine pour relaxer chez nous dans mes affaires avec une bonne Corona. Mais finalement, l’agenda s’est rempli assez rapidement. Un party par-ici, une fête par-là, des appels pour rétablir les services, des entrevues pour trouver un emploi, etc. Au bout du compte, la vie a repris son cours assez rapidement malgré nous. Notre rythme de vie de la dernière année commençait déjà à n’être qu’un lointain souvenir.

On le réalise vraiment au retour, mais sur la route, malgré qu’on avance continuellement, le temps est beaucoup plus relax et flexible. Il n’y a pas d’impératif ou d’obligation d’être à un endroit à un moment donné. Non seulement tu n’as plus le stress du boulot, mais tu n’as plus le stress de rencontrer des échéanciers. N’étant plus physiquement au pays, tu n’as plus à te sentir mal de dire non à une invitation. C’est automatique, les gens s’attendent à ce que tu fasses seulement un court appel ou une petite vidéoconférence.

Au retour, tout ce pan de la réalité de la dernière année disparaît.

Les souvenirs du voyage sont également plus espacés. Tu as un petit sourire en coin lorsque tu vois un endroit visité à la télévision ou que telle chanson te rappelle ton roadtrip en Nouvelle-Zélande. Tu réalises de plus en plus que cette belle parenthèse est vraiment terminée.

C’est également déstabilisant. Tu réalises que ta résolution de consommer différemment ne sera pas facile à mettre en place. Nous sommes tellement conditionnés par la société. Pendant une année, notre consommation a été au strict minimum. Nous vivions dans nos valises sans trop accumuler de choses. J’ai eu des étourdissements à mon premier passage au Club Price (Gen dirait qu’il faut dire Costco maintenant, mais je suis un nostalgique). Voir ce temple de la consommation, c’est quelque chose. Surtout quand tu as vu les effets de la surconsommation un peu partout dans le monde. La consommation à tout prix donne vraiment envie de vomir. Bon, les nausées s’estompent rapidement et à défaut de changer la société, tu prends sur toi de changer tes comportements. Encore plus qu’avant de partir. Le recyclage ce n’est peut-être pas assez en fin de compte.

Tu commences à faire tes propres biscuits pattes d’ours et tes barres tendres pour minimiser ton empreinte écologique un peu. Qui aurait cru que c’est si facile à faire et dix fois meilleur que les produits du commerce? Tu peux même congeler le tout afin d’avoir des réserves.

Le retour, c’est doux-amer. Tu es content et en même temps, tu es nostalgique. Le plus gros défi du retour, ce n’est pas de se réapproprier sa vie. Les choses reviennent assez vites à leur place.

Non, la difficulté du retour, c’est de voir comment tu vas pouvoir conserver les bienfaits de la dernière année dans une vie un peu plus conventionnelle. Pas que notre vie est plate, mais c’est difficile de « topper » ce que nous avons vécu l’année dernière. Oui, oui, malgré toutes les difficultés, c’était l’expérience d’une vie. Pour nous, ça passe par des petits changements et de nouveaux projets.

Pour moi le retour, c’est beaucoup de patience aussi. Ayant démissionné avant de partir, je dois me retrouver un emploi contrairement à Gen qui reprenait le boulot comme si de rien n’était. Je pensais trouver rapidement. Je suis quand même dans un domaine en demande. Mais, c’était sans compter les vacances et les longs processus de sélection. Il faut être patient pas à peu près.

Attendre des retours d’appels pour une job ça teste déjà ta patience, mais être à la maison à longueur de journée c’est encore pire. J’aurai eu de quoi m’occuper, mais ayant un seul revenu, il faut limiter les dépenses et donc par de gros projets de rénovation ou autres. Tu as beau te faire une liste, tu passes assez rapidement au travers après les premières semaines. Il faut être créatif.

Je pensais aimer ça pouvoir écouter des films ou jouer à des jeux vidéo à journée longue, mais après 2-3 jours le temps commence à être long. C’est là que tu te rends compte que le travail te manque vraiment ou du moins avoir une occupation qui permet de combler tes journées. C’est fou comme je n’aurais jamais cru dire ça durant la dernière année, mais le travail me manque. Bon la route aussi, mais il faut bien payer ça ces petits voyages là.

Heureusement que le retour à l’école est arrivé. Je peux m’impliquer avec les enfants et dans les comités pour m’occuper un peu. Ce n’est pas un emploi, mais c’est déjà quelque chose pour s’occuper l’esprit.

Ça permet également à Gen d’avoir un retour plus mollo. Elle peut se concentrer sur le travail pendant que je m’occupe des enfants et des dix mille autres choses que la vie nous impose. Au moins, nous pouvons dire que notre introduction à la vie traditionnelle se fait progressivement. Le choc est probablement moins pire.

Donc, le retour c’est comment? C’est plein de choses et de sentiments en même temps. C’est un peu indescriptible. C’est une réalité alternative propre à chaque aventure! La seule certitude que je peux dire, c’est que ça prend du temps et que dans le fond de toi-même, tu sais que les choses ne seront plus jamais pareilles. Le hic, c’est que tu ne sais pas combien de temps ça va prendre, ni ce à quoi ça va ressembler à la fin. Tu es de retour, mais peut-être que tu n’es finalement jamais revenu …

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